RCF61 Mars 2021 Mes chers amis, je suis heureuse de vous retrouver aujourd’hui. J’espère que vous allez aussi bien que possible. N’oubliez pas que la vaccination peut vous aider à traverser la crise de la Covid 19. Je pourrais vous parler du Carême que nous venons de vivre, de la Semaine Sainte, de la fête de Pâques…. Non, je ne vais pas vous parler de l’actualité liturgique, mais d’une madeleine de Proust qui me poursuit depuis …. une soixantaine d’année ! Je devais avoir une douzaine d’années quand l’un de mes professeurs, dans un collège catholique, m’a parlé de Saint Tarcisius. J’ai été frappée par l’histoire de cet adolescent du IIIème siècle. Je vais vous le présenter. Tarcisius était un jeune homme qui fréquentait les catacombes de Saint Calixte à Rome, il était très fidèle à ses engagements chrétiens. Il aimait beaucoup l’Eucharistie et était vraisemblablement un acolyte, c’est-à-dire un servant d’autel. A cette époque, l’empereur Valérien persécutait durement les chrétiens, qui étaient contraints de se réunir clandestinement dans les maisons privées ou dans les catacombes pour écouter la Parole de Dieu, prier et célébrer la messe. Même la tradition de porter l’Eucharistie aux prisonniers et aux malades devenait de plus en plus dangereuse. Un jour, alors que le prêtre demandait comme d’habitude qui était disposé à porter l’Eucharistie aux frères et sœurs qui l’attendaient, le jeune Tarcisius se leva et dit « Veux-tu que je m’en charge ? ». IL semblait bien jeune, Tarcisius, pour cette mission dangereuse ! « Ma jeunesse, dit Tarcisius- sera le meilleur abri pour l’Eucharistie. » Le prêtre lui fit confiance et confia à Tarcisius le précieux Pain en lui disant « Tarcisius, rappelle-toi qu’un trésor céleste est remis entre tes jeunes mains. Evite les chemins fréquentés et n’oublie pas que les choses saintes ne doivent pas être aux chiens ni les perles aux cochons. Seras-tu capable de protéger avec fidélité et assurance le Saint Sacrement ? » « Je mourrai, répondit Tarcisius avec fermeté, plutôt que de le céder. » En route, il rencontra des amis qui, s’approchant de lui, lui demandèrent de se joindre à eux. Ils n’étaient pas chrétiens, et devinrent soupçonneux et insistant quand il voulut continuer son chemin plutôt que d’accepter leur demande. Ils se rendirent compte qu’il serrait quelque chose sur sa poitrine, qu’il semblait vouloir protéger. Ils tentèrent, mais en vain, lui arracher ce qu’il tenait sur son cœur et la lutte se fit de plus en plus acharnée surtout lorsqu’ils surent que Tarcisius était chrétien ! Ils lui donnèrent des coups de pied, lui lancèrent des pierres, mais il ne céda pas. Laissé pour mort, il fut rapporté au prêtre par un officier prétorien du nom de Quadratus, devenu chrétien clandestinement. Il avait perdu la vie, mais il serrait encore contre sa poitrine un petit morceau de lin contenant l’Eucharistie. Il fut immédiatement enterré dans les catacombes de Saint-Calixte. Le témoignage de Saint Tarcisius nous enseigne l’amour profond et la grande vénération que nous devons avoir pour l’Eucharistie : c’est un bien précieux, un trésor infini, c’est le Pain de Vie, c’est Jésus lui-même qui se fait nourriture, soutien et force pour notre chemin de chaque jour vers la vie éternelle. Il y a juste 35 ans, le 28 mars était le vendredi saint. Vous devez vous demander comment et pourquoi je me le rappelle ! Ce jour-là est mon 5 ème enfant, un beau petit garçon prénommé Nicolas. Il est arrivé à l’improviste à Rambouillet, le train passait par ! J’ai demandé à une infirmière s’il était possible d’avoir la visite d’une personne de l’aumônerie pour communier le jour de Pâques. Le jeudi saint et le vendredi saint étaient passés à la trappe, j’espérais pouvoir vivre vraiment la joie de Pâques. Vous pouvez imaginer ma surprise et ma déception quand on me répondit que l’aumônier ne viendrait pas dans la maternité car on lui demandait de mettre une blouse blanche et il le refusait ! J’ai été très peinée de ne pas pouvoir communier, je dirais même que j’ai ressenti une souffrance physique de ne pas communier ce jour-là. Maintenant, j’habite à Rémalard, près de l’Eure et Loir. Dans un village voisin, un vieux prêtre un jour a présenté à mon équipe de catéchisme une statue de Saint Tarcisius ! C’était bien la première fois que je voyais une statue de ce saint. J’étais heureuse de retrouver ce jeune homme qui avait donné sa vie pour protéger l’Eucharistie 760 ans plus tôt. Mais mon histoire avec Tarcisius ne s’arrête pas là. Peu de temps après cette rencontre avec la statue de Saint Tarcisius, une amie m’a demandé si je voulais bien la remplacer pour porter la communion à une dame handicapée, ce que j’ai accepté avec joie. C’était il y a une dizaine d’années, ce n’était que le début de ma mission auprès des malades, des handicapés et des personnes âgées : porter la communion à ceux qui ne peuvent plus venir à la messe. Chaque fois que je vis ce moment fort, je remercie la personne que j’ai visitée. La foi est, à mon avis, la chose la plus intime de l’être humain, et nous nous donnons l’un à l’autre dans ce moment de prière. L’émotion est très grande chaque fois. Quand je vais à la messe, avec ma custode, je repense toujours à cette communion qui m’a été refusée à Rambouillet, ma souffrance ce jour-là. J’imagine la souffrance des personnes qui ne peuvent plus venir à la messe et je suis heureuse de prier avec eux et de leur porter le Corps du Christ. Je ne tiens pas spécialement à vivre le martyre, comme Saint Tarcisius, mais je suis heureuse de remplir la même mission que lui auprès de ceux qui souffrent. J’espère ne pas vous avoir trop surpris avec le sujet de mon propos, le hasard des dates a guidé mon choix. Je suis surtout heureuse de partager avec vous mon bonheur de petit Tarcisius des temps modernes. N’oublions pas, cependant que nous entrons dans la Semaine Sainte qui commence en fanfare avec l’entrée triomphale de Jésus dans Jérusalem, continue avec l’institution de l’Eucharistie, l’arrestation, la condamnation et la crucifixion du Christ pour s’achever en apothéose avec la fête de Pâques. Traversons cette semaine avec foi, nous avons la chance de savoir qu’elle nous conduit à la joie de Pâques. Soyez heureux, soyez prudents ; je vous retrouverai avec plaisir fin avril sur RCF61, bien entendu.