Mon ami Mai 2022 Bonjour, mes chers amis. Je pourrais vous parler de la joie de Pâques, du printemps qui nous offre ses palettes de couleurs… Je pourrais… Je pourrais… Non, je ne vous parlerai pas de tout cela. Je voudrais vous parler de mon ami Maurice. Tout commence en février 2012, il y a déjà 10 ans ! Avec mon mari, nous sommes partis en pèlerinage en Terre Sainte avec un groupe de notre paroisse. Nous ne connaissions pas tous les pèlerins, mais parmi eux mon mari me présente Maurice, qu'il avait connu dans son enfance. Maurice marche avec l'aide de 2 cannes, mais il veut absolument faire ce pèlerinage ! Il a fait tous les déplacements, toutes les visites ! Il y avait toujours quelqu'un auprès de lui, quand c'était difficile comme la montée à la forteresse de Massada, on bavardait avec lui, et ça passait. Quelle rage il avait pour marcher dans les pas du Christ ! Pendant quelques années, on voit Maurice à la messe avec ses cannes, et un jour de Décembre je dis à mon mari : ça fait un moment qu'on n'a pas vu Maurice, il ne doit pas aller très bien. Je l'appelle donc et lui demande s'il serait heureux que je lui porte la Communion, il me répond OUI. C’était il y a au moins 5 ou 6 ans. Et là commence une grande amitié et une grande intimité dans la prière. Je rends grâce à mon mari qui me laissait filer toutes les semaines quand je lui disais « Je vais voir Maurice ». Et avec Maurice, nous refaisions le monde, il me parlait de son Perche qu'il connaissait comme personne et tout doucement nous glissions vers un temps de prière qui nous faisait du bien . Comme il était émouvant quand il me disait « tu te rends compte, si tu ne venais pas, je ne pourrais pas communier ! », et puis il me parlait de l'homelie de la messe télévisée. Je pouvais alors, rentrée chez moi écouter cette homélie et nous en reparlions la semaine suivante. Nous chantions des cantiques, il aimait beaucoup chanter. Un jour, il me dit, les toubibs ont enfin mis un nom sur mon handicap, j'ai la sclérose en plaques ! Il peut enfin nommer son ennemi et donc se battre contre lui, mais on est bien conscients que cette maladie est incurable. La bataille commence et Maurice garde toujours le moral, il me dit souvent que c'est sa foi en Dieu qui le tient debout. Cependant, la maladie gagne du terrain inexorablement et le handicap, et donc la dépendance, augmente. Un jour, j'aborde en tremblant le sujet de l’onction des malades . Pas évident d'aborder ce sujet avec un ami… A ma grande joie, il accueille bien ma proposition, et, après avoir reçu ce sacrement, il me dit un jour que ça lui a fait du bien. Il recevra ce sacrement plusieurs fois pendant sa maladie, pour l'aider à vivre les épreuves à venir. L'été 2021, comme tous les ans, je pars en vacances. Quand je reviens en septembre, je trouve qu'il va moins bien et il me dit en pleurant qu'on lui a décelé une tumeur au cerveau, inopérable ! Et il me tend un papier, c'est le livret qui avait été fait pour les obsèques de son épouse, il y a 28 ans. Je comprends le message. Nous reprenons avec bonheur, malgré tout, nos temps de prière et la communion que je lui porte, nos moments d'intimité dans la foi. La maladie avance, et petit à petit il perd toute autonomie. Je ne peux plus lui donner la communion, mais nous parlons, lui très peu, moi beaucoup plus. Nous prions, la Parole de Dieu nous aide, nous écoutons des chants…. La maladie avance encore, le murant petit à petit dans un mutisme quasi-total. Quelle joie quand je l'entends murmurer « à bientôt » dans un souffle quand je lui ai demandé s'il voulait que je vienne la semaine suivante ! Petit à petit, il sombre dans une somnolence quasi permanente. Je lui parle doucement, parfois il ouvre un œil. Je m'assieds près de lui et dis doucement le chapelet… Je me bagarre un peu pour continuer à venir . Le 25 mars, il fait très beau. En arrivant chez Maurice, j'ai fait une photo du magnifique magnolia qui est dans la cour. Je le trouve tout réveillé, presque joyeux ! Je lui montre la photo du magnolia, et , comme c'est le 25 mars, je lui rappelle notre séjour à Nazareth, en Terre Sainte. Apres la lecture de l'Evangile du jour, je dis doucement le chapelet et repars après avoir tracé une croix sur son front. Au revoir, Maurice. Je ne savais pas que je ne le reverrai plus. Je n'ai plus été autorisée à venir prier auprès de lui alors je venais dire le chapelet devant sa maison. Le 10 avril, je suis partie à Paris pour des raisons médicales. Ah ! Maurice, comme je t'en veux d'être mort le 11 avril. J'aurais voulu venir me recueillir auprès de toi, et prier la Vierge comme je le faisais avant. Mais je dis avec assurance que Maurice vit maintenant, alors que ces derniers mois, il ne vivait plus. Quand je suis arrivée à l'hôpital, pour une opération programmée, j'ai tout de suite prévenu les infirmières que j’étais triste, elles ont été adorables. Le samedi, à l'heure de ses obsèques, apaisée, j'ai prié pour mon ami, enfin libéré de sa maladie, enfin VIVANT dans le Royaume de Dieu.